
Michel Salager, Président de la SLHP Site web : https://www.slhp.fr/accueil
Présentation par Jean-Marc Berlière
J’ai longtemps déploré la méconnaissance – pour ne pas dire le désintérêt ou l’indifférence – des policiers pour l’histoire de leur institution. Le problème dépasse de très loin la connaissance historique pour plonger au cœur du politique et de la morale politique.
En effet, comment créer une police soucieuse des valeurs démocratiques, attachée à sa mission de protection des citoyens et des libertés si les policiers ignorent ses dérives, l’emploi dévoyé qu’en ont fait des gouvernements autoritaires ? On pense immédiatement au rôle des commissaires de police de la ville de Paris (tous sauf un seul !) arrêtant au mépris de leur immunité parlementaire les députés républicains dans la nuit du 2 décembre 1851, premier acte du coup d’état fomenté par le « prince président » Louis Napoléon Bonaparte, qui allait mettre fin à la Seconde république. Et bien sûr comment ne pas penser aux missions infâmes dont furent chargés, de 1940 à 1944, les policiers contre des gens qui n’étaient coupables que de leurs convictions politiques ou philosophiques ou, pire encore, de la religion de leurs grands parents ?
C’est pour toutes ces raisons que j’ai donné pendant quelques décennies des cours d’histoire de la police dans les écoles de police, ou « sensibilisé » au Centre de documentation juive contemporaine (devenu le Mémorial de la Shoah) les jeunes gardiens de la paix entrant en fonction, au rôle exigé par l’occupant – et le gouvernement de l’Etat français – que durent jouer leurs ancêtres dans la répression raciale. Mais comme les choses ne sont jamais toutes noires, j’ai aussi rappelé le rôle héroïque, quoique obligatoirement discret, joué par des policiers dans une résistance à laquelle ils ont apporté un concours irremplaçable, que beaucoup ont payé de leur liberté ou de leur vie : un rôle pas toujours compris par des résistants bien éloignés des subtilités du nécessaire et dangereux double jeu joué par des policiers placés au cœur de la machine répressive. Pas toujours récompensé non plus par une administration pour laquelle la désobéissance aux ordres et à la hiérarchie, si elle sauvait la réputation morale de l’institution, sapait ses fondements : l’obéissance, la discipline.
Tout ceci pour dire que nul ne saurait davantage se réjouir que moi, quand des policiers se sont lancés depuis une vingtaine d’années dans des recherches historiques et des travaux qui apportent beaucoup à notre connaissance. Car en vrais professionnels, ils « savent lire » un PV d’interrogatoire, décrypter les subtilités d’une enquête intelligemment sabotée, et mille autres choses qui échappent au profane à courte vue, qui, porté par la vague du police bashing actuel, nourrit un sentiment antiflic à courte vue dont certains ont fait un fonds de commerce militant ou politique. La SLHP (Société Lyonnaise d’Histoire de la Police) s’attache à mettre en lumière ces inconnus, ces héros discrets et oubliés auxquels pourtant nombre de résistants, de juifs, doivent leur salut sans même le savoir. Pour autant, ses membres n’hésitent pas à épingler les faux résistants, les profiteurs de titres immérités, les déportés au rôle ambigu…
Parmi ces travaux historiques menés par des policiers qui ont accepté de se soumettre aux règles de l’histoire scientifique, à ses difficultés, à ses « risques réputationnels », le travail de la SLHP fondée par un policier retraité de la PJ lyonnaise, Michel Salager, mérite d’être mis en lumière. J’en ai parlé plusieurs fois dans une Lettre aux amis (que j’ai renoncé après 20 ans d’existence à continuer à rédiger), mais et il me semble de toute justice -et surtout de grand intérêt – que HSCO lui fasse une publicité bien méritée ainsi qu’aux publications de ses membres.
Vous trouverez le texte de leur publication n° 2025-1 en téléchargement, en suivant le lien ci-dessous, après cet extrait de l’éditorial de Michel Salager. Lisez-la, utilisez-la, suivez les pistes proposées, faîtes-la connaître aux gens qui peuvent y trouver aide et intérêt pour leurs propres recherches.
Avec Gilbert Moreux, nous avons conçu l’idée de HSCO pour cette intelligence, cette coopération, ce partage entre des chercheurs passionnés. La SLHP s’inscrit parfaitement dans cet idéal dénigré et moqué par des historiens officiels…
Jean-Marc Berlière
Extrait de l’éditorial de Michel SALAGER, président de la SLHP
La Résistance dans la police a bien existé. En réseau, isolés, au maquis, en fonction ou dans la clandestinité, engagés dans les Forces Libres, des policiers ont résisté. Sous diverses formes, faux papiers, renseignement, contre-espionnage, sabotage des procédures, noyautage des administrations publiques, aide et assistance, évasions, actions immédiates, sabotages, filière de passage, au combat, stockage d’armes et aide aux Juifs.
Incarcérés, internés ou déportés, nombreux ont donné leur vie, exécutés, assassinés, morts en déportation. Un nombre est avancé, peut-être 5 000…
L’Histoire de la Police est inclusive. Elle fait partie de l’Histoire nationale, de sa Mémoire. C’est notre but de contribuer et de participer à la connaissance de cette Histoire et de cette Mémoire, de la diffuser, de la transmettre. Il reste encore beaucoup à découvrir, à analyser, à comprendre.
C’est ce que nous proposons, notamment dans cette première Lettre d’information de 2025. Télécharger la Lettre d’information de la SLJP n° 2025-1 => slhp newsletter 2025-1