20 août 1941 : la grande rafle dont on ne parle pas

Par Emmanuel de Chambost.

Le matin du 20 août 1941, à 5h30, 2400 inspecteurs, gradés et simples gardiens de la Préfecture de Police de Paris encadrés par des officiers et sous-officiers allemands, bouclaient le 11e arrondissement de Paris. L’objectif de l’opération était l’arrestation de tous les hommes juifs de l’arrondissement âgés de 18 à 50 ans, mais comme le bilan de la rafle du 20 août atteignit tout juste 3000 hommes, les autorités d’occupation décidèrent de poursuivre l’opération les jours suivants sur d’autres arrondissements. Le camp de Drancy où furent dirigés toutes les victimes de ces arrestations hébergeait le 25 août au soir 4230 internés.

Comme les Parisiens purent l’apprendre en lisant la presse quotidienne du 21 août, cette opération avait été décidée « à la suite de manifestations communistes qui s’étaient produites ces temps derniers dans le XIe et auxquelles avaient pris part, comme on le sait, de très nombreux éléments Juifs ».

Paris-Soir – 21 août 1944 (Gallica)

Cette rafle, très correctement documentée par des historiens de référence1 est cependant souvent ignorée dans de nombreux récits historiques. La rafle dite du Vel d’Hiv déclenchée un an plus tard dans un tout autre contexte, l’affaire de la section spéciale enclenchée dès le 21 août, ou l’affaire des otages fusillés de Châteaubriant, Nantes et Bordeaux survenue deux mois plus tard éclipseront cette répression du 20 août que l’on peut considérer à certains égards comme la plus importante de toute l’histoire de l’Occupation.

Force est de reconnaître que ces évènements du 20 août ne représentent pas le bon exemple pour illustrer ni l’histoire du Parti communiste sous l’Occupation, ni l’histoire de la persécution des Juifs par Vichy, ni celle de la mise en œuvre de la solution finale par les Allemands, ni la politique de collaboration des gouvernements français. Ceci explique peut-être cela…

A contrario, c’est précisément parce que ces évènements se trouvent au carrefour de plusieurs histoires qui ont chacune leurs propres chronologies que le 20 août est un lieu d’observation privilégié sur l’histoire, complexe, de l’Occupation en France.

Lire et télécharger l’article entier => Rafle_20 aout_1941_EdC_hsco_v3

 

1Serge Klarsfeld, Vichy-Auschwitz, Fayard Tome 1, 1983, pp.25-29 et Jean-Marc Berlière, Polices des temps noirs, France 1939-1945, Perrin, 2018, pp.765-769

 

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1 réponse à 20 août 1941 : la grande rafle dont on ne parle pas

  1. Emmanuel de Chambost dit :

    A la suite de la mise en ligne de cet article, Michel Bergès, que je remercie m’a fait part de précisions concernant des démarches effectuées pour obtenir la libération de Pierre Masse :

    Lors du procès public de Vallat, M. Olchanski, membre du Consistoire israélite central pour la zone nord (jusqu’au 5 juillet 1942) déclara dans son témoignage demandé par l’inculpé Vallat :

    « – M. Vallat m’a dit qu’il avait fait des démarches pour faire relâcher Pierre Masse sans que nous ayons, nous, à intervenir pour lui poser cette question, – car Pierre Masse était à Drancy, nous n’avions aucune communication avec lui. Et M. Vallat m’a dit, quelques jours après :
    “ – Je ne peux rien faire, car la Radio américaine a parlé de Pierre Masse, et les Allemands se refusent à le libérer.”
    Voilà la réponse à la question qui m’a été posée. »

    Vallat ajouta à cette réponse, devant la Cour :

    « En ce qui concerne le cas précis de Pierre Masse, j’avais pensé que, sans qu’il devînt, effectivement, plus tard (puisque nous pensions tous que ce serait André Baur) Président de l’UGIF, on avait peut-être ce moyen de le faire sortir immédiatement de Drancy, en disant au Majestic, et je l’ai dit :
    “– Nous avons besoin de la personnalité de M. Pierre Masse, à cause de son prestige, de son autorité morale sur ses coreligionnaires pour être à la tête de l’UGIF, et je vous demande de le libérer.”
    Ils ont fait la réponse que le témoignage vient lui-même de rappeler. »

    Le Président de la Cour ajouta cette précision importante :

    « Mais le Barreau de Paris conserve, lui, ce souvenir de Pierre Masse :
    Pierre Masse avait été arrêté avec d’autres de ses confrères, et lorsque l’Allemand a proposé à Pierre Masse de le libérer, Pierre Masse a refusé tant que ses confrères ne le seraient pas. » 

    Ref : Le Procès de Xavier Vallat, présenté par ses amis, Paris, Éditions du conquistador, 1948, pp.216-217.

    L’indication du refus allemand est bien confirmé par la note de Zeitschel à Schleier ( CDJC LXXI-85 a – 1 folio photocopié)

    « (30 mars 1942). Note de Zeitschel à Schlier : Du Moulin de la Barthète vient de solliciter, au nom du Gouvernement de Vichy, la libération de Pierre Masse. Il ne faut pas se contenter de repousser énergiquement cette requête, mais il faut également faire part aux Français de la stupeur allemande devant une requête en faveur d’un fauteur de guerre et d’un ennemi de l’Allemagne et de la France nouvelle, tel que ce personnage. » 

    Emmanuel de Chambost

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