René Fallas, grand résistant, adhérent de notre association et ami de l’Histoire, nous a quittés

Par Jean-Michel Adenot, Président de HSCO –

René FALLAS n’est plus.

A quelques jours de ses 97 ans, René FALLAS témoignait encore. Il était l’un des derniers sinon le dernier créateur, fin 1941, avec Marcel LEROY (mort en déportation), d’un important mouvement de résistance, « Lorraine ». Cette organisation à vocation plus politique que militaire va rapidement essaimer sur toute cette région et le nord de la Franche-Comté. Son journal éponyme est souvent cité dans les historiques de la résistance. Après une première phase de développement en totale autonomie, les deux dirigeants établissent le contact avec Ceux De La Résistance, puis avec la résistance gaulliste. Leur action s’intensifie, et s’intègre progressivement dans l’unification engagée par le BCRA. A la Libération, René FALLAS tourne la page et s’implique dans le syndicalisme.

La biographie de René FALLAS est remarquablement résumée dans le Maitron (cliquer sur le lien ci-dessous). Cet article se termine sur l’entrée tardive de l’intéressé dans le monde de l’écriture historique -d’après nos informations, quelques années avant la date indiquée- et son mémorable coup de gueule en préface de l’inégal « Aubrac Lyon 1943 » de Gérard CHAUVY. Pointant de façon générale les multiples versions de témoignages acceptés sans réserve par les historiens, René FALLAS dénonce : « La Résistance n’est pas un mythe mais les mythomanes de la Résistance et leurs thuriféraires sont légion ». Juste remarque, mais affirmation totalement inaudible en marge d’un ouvrage hémiplégique, en ce sens qu’il présente maladroitement une argumentation inédite très riche et uniquement à charge … d’où un procès logiquement perdu par Gérard CHAUVY et son éditeur. L’observation de René FALLAS n’en reste pas moins pertinente. Je tiens à compléter ces lignes, car j’ai eu la chance d’échanger personnellement avec l’ancien dirigeant co-créateur de « Lorraine ».

C’est à la fin des années 1970, et à la faveur d’une rencontre, que René FALLAS reprend contact avec son ancien mouvement. Il découvre un historique, devenu officiel, en complet décalage avec ses souvenirs. En effet, la mort du créateur et l’absence de son adjoint avaient laissé le champ libre à de multiples reconstructions factuelles et temporelles. Le principal reconstructeur était un cadre du second cercle de « Lorraine », résistant authentique mais sans vision d’ensemble. Certainement désireux de valoriser son propre rôle, il avait maladroitement occupé la place et littéralement écrit l’histoire. Les délais de forclusion étant dépassés, René FALLAS constate que l’homologation officielle de « Lorraine » n’a même pas été défendue, la plupart de ses membres étant reconnus au titre d’autres organisations. C’est ce fait déclencheur qui pousse René FALLAS à s’interroger et à entamer une quête documentaire féconde. Avec les moyens d’investigations des années 1980, il retrouve jusqu’à un document signé par le Général et mentionnant expressément « Lorraine ». Pourtant René FALLAS n’a pas souhaité aller au-delà de ses dossiers. Ils montrent la réalité d’une organisation et les écarts accumulés par l’écriture des mythomanes. J’ai en mémoire le nombre de parutions du journal « Lorraine » et la date des premiers numéros. Il faut suivre la démonstration minutieuse de René FALLAS pour se convaincre que les déclarations croisées des reconstructeurs ne tiennent pas. C’est une source d’étonnement et une recommandation à la prudence dans l’utilisation des sources, même tout juste postérieures à la Libération et réputées dignes de foi. Malheureusement, l’histoire de « Lorraine », toujours bancale, n’a pas été remise à plat, l’ancien résistant n’ayant pas franchi le pas.

René FALLAS nous a quittés. Il nous lègue plus que des indices. Les nombreux documents annotés de sa fine écriture et confiés à ses amis méritent une mise en perspective, à la lumière des fonds d’archives enfin ouverts sans restriction. Pour « Lorraine » comme pour la plupart des mouvements, l’histoire de la résistance n’est pas écrite.

C’est dans ce sens que René FALLAS avait rejoint notre association et suivait avec attention nos travaux … pour une histoire scientifique et critique.

Notre prochain colloque (25 septembre 2019) lui sera dédié.

Jean-Michel Adenot

Président HSCO

Pour en savoir plus : http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article50517, notice FALLAS René, Henri. (Pseudonyme : MAGNIN René), par Gilles Morin, Michel Blondan, version mise en ligne le 5 juin 2009, dernière modification le 3 février 2019.

Ce contenu a été publié dans Résistance / Maquis, Vie association HSCO. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.